Nous avons animé le dernier cours de Maurice Roy en célébrant le « Triomphe de la Mécanique ».
Daniel s’en souvient plus que bien :
« L’apothéose de la Mécanique Rationnelle
« Maurice Roy était un personnage… qui ne se prenait pas pour son cologarithme.
« Il avait une très haute idée de sa valeur scientifique, et il y avait quand même des raisons pour ça,étant président de l’Académie des Sciences. Il enseignait à l’X la thermodynamique, le mécanique rationnelle (non pas par opposition à la mécanique irrationnelle, mais parce qu’elle traite des mouvements de corps indéformables : chef d’oeuvre : la bille de billard…), la mécanique des milieux continus (mécanique des fluides : aéro- et hydro-dynamique, des structures).
« Il avait le sens de la formule : « Il a fallu des siècles pour séparer de sa gangue le pur diamant des idées fondamentales et fécondes » (les siennes naturellement).
[…] ou des affirmations paradoxales : « Le mouvement naturel d’un avion est la vrille » ou encore : « Il est impossible de satelliser un corps à partir de la surface de la terre. »
« Il a donc souvent été tourné en dérision, alors qu’il avait en fait raison : « lâché à vitesse nulle, un avion se met naturellement en vrille, et si on ne dispose que d’un canon, on ne peut pas satelliser un corps à partir de la surface terrestre. »
« En réalité, il faut bien reconnaître que ses cours étaient brillants… très efficaces parfois (thermodynamique) et parfois totalement inutilisables, car trop théoriques (milieux continus…).
« C’est à l’occasion de son dernier cours en première année que nous avons décidé de lui rendre hommage.
« Le scénario a été monté comme suit : une cloche a été dénichée dans une cave du Boncourt, transportée laborieusement (elle devait bien peser 100 kg) dans les sous-sols de l’amphi Poincarré. Par ailleurs, un ancien qui jouait très bien de la trompette a été embauché et installé au dessus de l’amphi, afin d’accompagner une apparition magique : celle du petit nange, en tenue de travail, descendant comme il se doit au bout de son fil, inondant le vénéré savant de pétales de roses odorantes…
« Nous avions prévenu le professeur que nous lui préparions une surprise pour la fin de son amphi. Mais il a quand même été un peu interloqué d’entendre un carillon ponctuer chaque quart d’heure de son exposé. On le sentait vaguement inquiet. Il a donc quelque peu expédié sa leçon, et était en avance sur son horaire. Il faisait donc un peu de remplissage, quand une plaque du plafond de l’amphi a explosé avec fracas, une sonnerie de trompette triomphante a retenti, et le petit n’ange est noblement descendu comme prévu, au milieu des pétales de rose, dans une atmosphère de liesse, un chahut indescriptible.
« Le pitaine de ser a bondi… mais il n’a pas pu atteindre le petit n’ange, dont la fuite a été protégée efficacement par une haie de cocons dévoués. La mili est arrivée trop tard dans les combles de l’amphi pour coxer le musicien et les alpinistes/spéléo qui avaient assuré la sécurité du petit n’ange ; dans le sous-sol : la cloche y était, mais le carillonneur avait pris la fuite. Donc, la procédure habituelle a été appliquée : x fois n JAR respons… Cela faisait un bon petit paquet.
« Nos caissiers ont essayé de faire intercéder Maurice Roy pour adoucir la peine. Il y a finalement consenti, avec cependant ce commentaire : « Ce garçonnet qui se dandinait à peine vêtu au bout d’un fil avait quelque chose de très peu… polytechnicien ! »
« Quel brave homme…mais visiblement d’un autre siècle ! »